Voilà près d'une semaine que le Père Noël est passé par notre balcon martiniquais;

Une semaine, donc, que je me trouve plongée dans un état mental totalement régressif, dans une fourchette d'âge comprise entre 3 et 9 ans.

Mardi, j'avais 3 ans. Ma journée, je l'ai passée à disposer des petits bonshommes en plastique, dont la marque commence par "P" et finit par "laymobil", dans une maisonnette de la même marque, sous le prétexte fallacieux que mes pépettes étaient BIEN TROP JEUNES pour parvenir à la monter seules.

Et de fait, elles étaient bien trop jeunes. Et moi, pas assez vieille, selon toute évidence.

Mercredi, j'ai dépouillé, durant une bonne partie de l'après-midi, l'ensemble de ma famille au Monopoly.

Pas de quartier!!! C'est ça, le monde des affaires. C'est la loi de la jungle, un monde de requins, un univers cruel, sans foi ni loi.

Bref, le Monopoly, c'est Dallas, avec des noms de rues de la ville de Toulon (marrant, ces éditions spéciales!).

Les enfants, seuls, n'y pourraient survivre. Et puis, Toulon, c'est vaste; il leur fallait bien un guide GPS spirituel pour les guider vers la victoire.

Moi, en l'occurrence.

Pendant 3 heures.

Parce que la quatrième, le mari, dans un dernier sursaut, s'est rebellé et m'a littéralement plumée. En l'espace d'un quart d'heure, il a mis à mal la totalité de mon patrimoine immobilier. Heureusement que nous sommes mariés sous le régime de la communauté de biens, sans cela, aujourd'hui, je serais SDF. Et l'argument de la trêve hivernale, par 30 degrés, ne me semble pas être un argument de premier choix...

Jeudi, je me suis transformée en confiseur, ma cadette ayant reçu un splendide coffret de fabrique à bonbons.

Là encore, le monde de chimie étant fort dangereux pour une enfant de 6 ans, il me fallait contribuer à sa sécurité et tester la marchandise avant de la lui soumettre; la cuisine moléculaire, moi, je n'ai pas confiance.

On ne sait jamais, une goutte d'arôme en trop et c'est l'explosion.

De saveurs.

Avouez, un bonbon en forme de soucoupe volante directement inspirée de Roswell, ça inspire déjà une certaine méfiance. Alors imaginez... un bonbon en forme de soucoupe volante contenant une sorte de poudre suspecte, pétillant curieusement sous le palais, provoquant un état de ravissement et une accoutumance se caractérisant par un irrépressible besoin d'y goûter, d'y re-goûter, d'y re-re-regoûter...

Moi je dis, les stups devraient agir, avant que l'irréparable de ne se produise.

C'est à dire, avant qu'il n'y en ait plus...

Vendredi, je me suis transformée en paléontologue des temps modernes.

Mon fils a reçu un kit permettant de recréer un semblant d' univers préhistorique (de l'ère du crétacé pour être exacte), à l'échelle microcosmique.

Si dans quelques mois la Martinique se transforme en une île inhospitalière, peuplée de gros dinos baveux, à la mine patibulaire et à la dentition à faire frémir le plus grand des stomatos, semant le chaos sur leur passage, cela signifiera que nous avons parfaitement réussi notre expérience.

Ou pas!

A l'intérieur, de quoi reconstituer une éruption volcanique (ainsi, si le Mont Pelé s'éveille, nous saurons à quoi nous en tenir), mais aussi redonner vie à la végétation de cette très lointaine époque, ainsi qu'à de curieux petits animaux:

les triops.

Mais siiiiii, les triops, vous savez! Ces petits notostracés!

Rha, des branchiopodes, si vous préférez...

Bon.. d'accord. des crustacés d'eau douce, quoi.

Mise en eau des précieux œufs, donc, le vendredi vers 15 heures. Eau de Volvic coupée au rhum à l'eau de pluie, intégration du substrat, et hop... Il devint urgent d'attendre...

Jusqu'à avant-hier, après notre retour de promenade, où nous avons pu distinguer, furtivement, entre deux remous, une microscopique forme transparente, presque indétectable pour un œil non averti comme le mien. Tant et si bien que j'ai d'abord supposé que mon imagination m'avait joué des tours, au bout de plusieurs looongues minutes passées à scruter la surface de l'eau, à la recherche du monde perdu.

Et puis, j'avais lu plusieurs témoignages à ce sujet: le triops était sensé être une bien vilaine créature:

Citations:

"Le triops, c'est comme des crevettes, mais en plus moche"

"Le dragon de mer feuillu, c'est la classe. Pas comme le triops tout moche!"

"Ca fait peur ce truc, c'est pas beau, c'est horrible!!!"

Aussi m'attendais-je plus à voir apparaître le monstre du Loch Ness, que d'attendrissantes larves diaphanes et dodues, évoluant en un ballet gracieux. Pourtant, elles étaient bien là... Deux petites bébêtes, aussi jolies que... Allez, avoue Mawie! Franchement, ça ressemble à des poux, non?

Rhooooaaaaa vous êtes méchants! Vous étiez beaux, vous, peut-être, à l'âge de la guerre du feu?

Je dirais plutôt... allez... des puces d'eau.

Bref, j'ai été quatre fois Maman, dont deux fois en une seule (vous me suivez, là?), mais jamais encore je n'avais mis au monde de créatures préhistoriques. Il y a en cela quelque chose de légèrement anachronique, et, comme il est à la mode de le dire, de contre-nature, n'est-il pas... Mais j'assume totalement ma nouvelle materni-crétacé.

A la vérité, je ne pensais pas connaître un jour plus microscopique que mes deux jumelles à leur naissance....

A bien les observer, je peux tout de même dire, même si cela fait de moi une mère indigne, que ma toute nouvelle progéniture est dotée d'une allure relativement improbable.

Non, soyons francs, c'est vrai qu'ils sont moches.

Sur la boîte, il est précisé qu'ils ne sont pas comestibles.

Mais à moins d'être un peu dérangé, personne ne se hasarderait à croquer de si vilaines choses.

Sauf à être français, et bouffeur d'escargots et de cuisses de grenouilles (Euuuuh... Qu'ai-je mangé, moi, déjà, pour mon réveillon?).

Je pense même qu' HR Giger pourrait en revendiquer la paternité... sans test ADN. Jugez plutôt:

Aussi, sur la question de leur physique, je décline toute responsabilité.

Mais comme tout parent qui se respecte, il me fallait baptiser les mochetés euh, nouveaux-nés.

C'est donc tout naturellement que mon choix s'est porté sur "Denver" et "Godzilla".

Oui, ben ne riez pas, hein! Ils ont failli s'appeler "Zarbi" et "Chelou", figurez-vous... Avouez qu'ils s'en sont bien tirés...

Bien, je me suis renseignée sur le régime alimentaire des petites choses.

Visiblement, tout va bien, puisqu'il ne se nourrissent pas de chair fraîche d'enfants, mais de petits insectes, dont la Martinique pullule.

Il semblerait qu'ils soient destinés à grandir de façon exponentielle, jusqu'à un certain point toutefois. Ce qui les oblige à muer plusieurs fois, sinon, ils finissent par ne plus rien avoir à se mettre sur le dos.

J'espère tout de même que demain, à mon réveil, Fort-de-France n'aura pas totalement été détruite par l'une des mes bestioles, qui aurait connu un excès de croissance dans la nuit.

Du coup euh... Note pour ce soir: Penser à bien planquer les produits laitiers.

Amis martiniquais, sachez tout de même que mes pichtis triops ne sont pas responsables du séisme de magnitude 4,6 que nous avons subi cette semaine.

Allez, pour le fun, je vous mets une photo émouvante de la naissance de Denver:

Vous pouvez me voir tout à fait à gauche de l'image, dans l'angle mort de l'écran, ce qui me rend invisible.

Deuxième personnage à gauche, le grand John Hammond, l'unique détenteur au monde du dernier spécimen de moustique suceur de dinos, sans qui rien de tout cela n'aurait été possible. Les autres, on s'en fout, de simples figurants.

Bon, bon, d'accord, puisque vous insistez, je vous joins une photo officielle:

Allez, par souci de précision, et afin de servir la science, un agrandissement:

Vous ne le voyez TOUJOURS PAS?! Que de mauvaise volonté! "Avant, j'avais de bons yeux, mais ça, c'était avant".

Eh bien, croyez-moi sur parole, finalement, cela vaut peut-être mieux. To be continued....

Mais... Dites-moi, nous sommes le premier janvier...

Avant de vous quitter, laissez-moi vous souhaiter une bonne crise 2013.

De foie, je voulais dire.

Plus sérieusement, à tous mes amis expats, j'espère que les fêtes furent bonnes, même loin des vôtres. Profitez de chaque minute.

Et pour les autres, un ami a écrit aujourd'hui une très belle phrase, que je me permets de citer ici:

"La vie a un début et une fin, tout le reste, c'est ce que vous en faites".

Ah non, attendez!!! Ce n'est pas celle-là...

Je reprends:

"Les rêves n'ont de limites que celles que vous leur donnez" (merci Aurélien...).

Des joujoux par milliers!

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